Les techniques et l’histoire de May

personnageOn ne peut comprendre les photos de May sans connaître son histoire. Chez elle, tout s’imbrique dans une autobiographie aussi touchante que sincère et, ici, le nu n’a pas le même sens que pour les autres photographes de ce numéro. D’autant que May est des deux côtés de l’objectif, devant et derrière …

Si ses photos la montrent sexy et joueuse, la réalité est moins réjouissante. Derrière ces nus et cette esthétique très moderne, May raconte son histoire. Avec son vieux Contax 159 MM et un 35 mm f:2,8, quelques films négatifs couleur 400 ISO et une lampe de bureau pour tout éclairage, May recrée un univers mystérieux. Un trépied, un retardateur et May se met en scène. Jouant des couleurs, des dominantes, des reflets, des transparences, des surimpressions. De l’érotisme aussi: quelle jeune fille n’a pas joué à la star devant son miroir? Ensuite, May assemble ses photos et ses textes dans de superbes albums précieux et décorés. Les couleurs subtiles et complémentaires rappellent sa formation de styliste orientale. Jusqu’à cette dernière série où elle réalise des superpositions en utilisant deux fois le même film. Histoire de mieux transcender le réel pour rejoindre la fiction. En attendant qu’un éditeur publie ce journal intime, voilà quelques extraits du journal de May qui accompagne ses images:

« C’est à Hong Kong, en septembre 1992, que j’ai pris mon premier cours du soir de photographie. Mon grand frère m’a prêté son appareil photo dont il ne se servait plus depuis longtemps. Cet appareil était vieux … Je l’ai fait nettoyer et j’ai commencé à faire des photos. Mon frère a vu mes photos et a décidé de me donner son appareil Quel bonheur ! Etant la cadette dans une famille traditionnelle, j’étais confrontée à plusieurs règles internes.
Règle n°1 Quand papa est en train de parler, ne pas poser de questions.
Règle n°2 : Ne pas faire d’objection aux décisions de papa.
Règle n°3 : Quand papa n’est pas là, c’est le grand frère qui prend sa place.
Règle n°4 :Après le mariage, les filles deviendront un « objet » de la famille de son mari.
Règle n°5: Dans une famille nombreuse, le plus grand a la priorité pour tout et la plus petite, moi en l’occurrence, n’a rien ou presque. A 18 ans, j’ai cessé les études de comptabilité parce que je me suis dit que ce ne serait pas un métier pour moi. Pour ma famille, j’étais quelqu’un de capricieux et de sauvage. Dans la culture chinoise ce ne sont pas des compliments ! Mon papa disait que les filles grandissent pour s’envoler. « Ce n’est pas la peine d’investir dans les filles ». J’ai bien compris cette logique. A 21 ans, j’ai quitté ma famille. J’ai travaillé pour deux agences de publicité. J’aimais la photo, mais je pensais que c’était plutôt un travail pour les garçons costauds !

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